L'amiante est devenu un matériau révolu. Objet de luttes sociales dans les années 1970, de batailles d'experts dans la décennie suivante, puis de scandales médiatiques à la fin du XXe siècle (Henry, 2007), l'amiante a longtemps été abordé en termes rassurants. À la fiction entretenue par les industriels d'un « usage contrôlé » de ces fibres s'est alors substituée la croyance que des lois d'interdiction pourraient régler définitivement la question. Plusieurs études d'histoire environnementale et de sociologie des sciences ont déjà montré comment, concernant l'amiante comme d'autres substances toxiques, le récit de la « prise de conscience » soudaine de leurs effets nocifs était en réalité une fiction et que nombre d'acteurs connaissaient les effets pathogènes de l'amiante dès le début du 20e siècle. La circulation et l'appropriation de ces connaissances ne se sont pas faites de manière linéaire, dans un contexte général de doute, donnant lieu à des « régimes de perceptibilité » très différents selon les territoires et les acteurs. En France comme ailleurs, la mobilisation des victimes a joué un rôle essentiel, d'abord pour obtenir des valeurs limites d'exposition, puis pour obtenir l'interdiction de tout nouvel usage. Or, quelles sont les trajectoires possibles d'une substance toxique après son interdiction ? C'est à cette question que cette conférence se propose de répondre.
Ce colloque international se déroulera en français et en anglais : des casques sont prévus pour une traduction simultanée